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Le touriste exige, le pèlerin remercie
Lorsqu'on marche en tant que pèlerin vers Saint-Jacques, on
a tout le temps de se poser de stupides questions du genre « Pourquoi
parvenons-nous tous à nous entendre et à vivre en harmonie sur le « Camino »
(nom couramment donné par les pèlerins au chemin vers Saint-Jacques), et pas
dans le monde ? » Sur le Camino, il y a des gens de tous les horizons, de
toutes les nationalités, de toutes les langues, de toutes les cultures et de
toutes les convictions. Pourtant j'y ai vécu en parfaite harmonie avec les
autres car chacun tenait autant compte d'autrui que de soi-même. Et cela, sans
efforts. Quelques exemples cités en vrac : nous partagions notre nourriture,
nous cédions volontiers nos onguents, crèmes et autres Compeeds (pansements anti-ampoules), nous nettoyions les sanitaires
après usage, nous proposions de porter une partie du sac de ceux qui peinaient,
nous cédions notre lit du bas aux plus âgés (la plupart des gîtes sont équipés
de lits superposés),... Echanges permanents, sourires rayonnants, regards
complices,... Tout cela coulait de source, se passait spontanément et dans la
bonne humeur. Quand la vie en commun est fluide et bouillonnante, elle est pure
comme l'eau dun torrent. Quand nous nous cantonnons dans la mare de notre
égoïsme, la vie stagne et croupit. Que faut-il faire pour que la vie quotidienne soit également
une fête de tous les instants ? La vie nest-elle pas un grand Camino où
l'arrivée sera ce moment immensément important qu'est la mort ? Il est
crucial de nous forcer à garder notre spontanéité, à garder notre sens de
l'humour, à ne pas nous laisser dévorer par les sollicitations de toutes
sortes, d'éteindre notre TV, de parler et de rire avec les autres, de nous
contenter de plaisirs simples, de recevoir les amis moins formellement, de ne
pas accumuler, de moins acheter (car on « porte » tout ce que l'on
possède et tout marcheur sait que pour avancer librement, il faut garder son sac
léger), de sourire sans arrêt car il est vecteur d'énergie, de se ressourcer
dans des lieux de prière, de silence ou de méditation, de régulièrement se
retirer du monde pendant quelques jours pour se régénérer. Le pèlerinage est un chemin où l'on peut être seul ou en
groupe selon son humeur. Il faut pouvoir alterner les deux approches. Il faut
apprivoiser ses larmes, ses émotions. Il faut se prendre en amitié et sourire
de ses petits défauts. La vie sur le Camino est simple, très simple.
Efforçons-nous dès lors de simplifier notre vie au maximum. Ne gardons que
l'essentiel. Travail de tri difficile certes mais indispensable pour avancer.
Soyons légers ! Soyons également accueillants par rapport aux événements et
aux autres. Beaucoup de gîtes en Espagne ont une affichette « Le touriste
exige, le pèlerin remercie ». Remercions la Vie pour ce que l'on a au lieu
de convoiter de façon infantile tout ce que l'on na pas. Même quand il
pleuvait des cordes, que le vent arrachait nos ponchos, que nos pieds
glissaient en tous sens dans la boue, que les douches étaient froides le soir
au gîte, nous riions et nous avions le sentiment d'une forte et belle journée. Nous n'avons aucun pouvoir sur les événements qui viennent à
nous, mais nous avons le pouvoir de changer notre attitude vis-à-vis de ces
événements. Encourageons-nous les uns les autres à nous battre sans
cesse pour vivre heureux. Nous le méritons ! Marc De Wilde (parti de Bruxelles
le 21/07/02 et arrivé à Saint-Jacques de Compostelle le 4/11/02) Rédigé le 1-Déc-2002 |
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